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comme simple soldat, dans la guerre du Hanovre, avait courageusement versé son sang pour la France. Aux yeux de la raison, c’est là, Messieurs, une noble origine.

Dans nos habitudes mesquines, parcimonieuses en matière d’enseignement public, l’envoi régulier que faisait la Convention, à tous les administrateurs de districts, des leçons sténographiées de l’École normale, nous semble une véritable prodigalité. Ce furent cependant ces cahiers qui éveillèrent le génie mathématique dont nous déplorons la perte ; qui déterminèrent la famille de Poisson à l’envoyer à l’École centrale de Fontainebleau, où ses progrès excitèrent l’étonnement des professeurs et des élèves. À peine arrivé à l’âge de seize ans, Poisson se présenta au concours pour l’École polytechnique, et fut reçu hors ligne. Les chefs de cet établissement célèbre virent du premier coup d’œil, à travers une écorce encore quelque peu campagnarde, tout ce que la science devait attendre du jeune élève ; ils pensèrent avec raison que les règlements ne sont pas faits pour ces cas exceptionnels et rares ; ils affranchirent Poisson des pénibles exercices graphiques impérieusement exigés de tous ceux qui doivent suivre la carrière des travaux publics, et lui donnèrent ainsi le moyen de se livrer sans partage à ses études favorites. Bientôt l’élève à la complexion faible, à la petite taille, aux manières enfantines, trouva une démonstration simple, concise, élégante, d’un important théorème d’algèbre relatif à l’élimination, sur lequel l’analyse n’avait encore produit qu’un volume énorme et presque illisible. C’était le premier et brillant anneau de la longue série de Mémoires qui devaient donner à