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Ma juste déférence pour les opinions de Poisson ne doit pas m’empêcher de signaler un point à l’égard duquel sa profonde érudition mathématique et son bon sens exquis ne l’ont pas, à mon avis, garanti d’une erreur historique. Je veux parler du géomètre à qui appartient réellement l’invention du calcul différentiel.

Le calcul différentiel est la plus grande découverte mathématique que les hommes aient faite, et si l’on considère l’importance et la variété de ses applications, c’est la plus belle conception de l’esprit humain. À l’aide du calcul différentiel, le mathématicien saisit les questions de toute nature dans leurs vrais éléments, dans leur essence intime ; il sonde ainsi, sans jamais laisser de lacune derrière lui, les plus secrets replis des phénomènes naturels. Le calcul différentiel fournit à de simples écoliers les moyens de résoudre, d’un trait de plume, des problèmes devant lesquels l’ancienne géométrie restait impuissante, même dans les mains d’un Archimède. Il ne faut donc pas s’étonner que deux beaux génies, Leibnitz et Newton, que deux grandes nations, l’Allemagne et l’Angleterre, se soient disputé, avec ardeur, avec animosité, l’honneur de l’invention.

Lorsqu’à la suite d’une profonde étude des pièces de ce mémorable procès, lorsque après avoir consulté de nouveau les Varia opera Mathematica de Fermat, publiés en 1679, quinze ans après la mort du célèbre auteur, Lagrange et Laplace reconnurent, il y a peu d’années, qu’il fallait regarder Fermat comme le véritable inventeur du calcul différentiel, nos voisins d’outre Manche se montrèrent vivement émus ; ils soutinrent