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Le projet de départ pour la France se trouvait ainsi clairement divulgué. Le général, à qui les adieux compromettants de Monge furent rapportés, en témoigna de l’humeur. Notre confrère se justifia facilement. Il dépeignit, d’une voix émue, les difficultés de sa position ; il fit remarquer que plusieurs circonstances avaient pu amener les membres de la commission scientifique à croire que Berthollet et lui ne se sépareraient jamais d’eux ; que peut-être ils seraient accusés l’un et l’autre d’avoir manqué à leur parole ; qu’il n’en fallait pas davantage pour expliquer quelques propos indiscrets qu’on leur reprochait. « Quant aux démarches, ajouta-t-il, qui ont donné l’éveil, permettez, mon cher général, que je vous le dise : vous y figurez vous-même pour une large part : certain portrait, un portrait de femme, demandé au peintre Conté trois fois dans la même journée, a plus fait travailler les imaginations que mes livres, mes manuscrits et mes modestes provisions. » Le général réprima un léger sourire, et le débat n’alla pas plus loin.

Pendant que les membres de la commission scientifique s’abandonnaient au désespoir, sans interrompre cependant leurs préparatifs de voyage pour la haute Égypte, un d’entre eux, Parseval-Grandmaison, en proie à une nostalgie inquiétante, quitta le Caire sans prendre conseil de personne et se dirigea sur Alexandrie.

Comment un homme malade, isolé, réduit à ses propres moyens, parvint-il à franchir l’intervalle de ces deux villes, à peu près aussi vite que le général en chef, disposant de toutes les ressources de l’armée et du pays conquis ? J’ignore si le poëte, en commerce de tous les