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tation plus récente pleine d’érudition et, ce qui n’est pas toujours la même chose, pleine d’esprit, publiée récemment par M. Génin, que l’air de Marlborough à une origine arabe ; que la chanson elle-même appartient au moyen âge ; que, suivant toute probabilité, elle fut rapportée en Espagne et en France par les soldats de Jayme Ier d’Aragon et de Louis IX ; qu’on doit considérer cette chanson comme une sorte de légende d’un croisé obscur, nommé Mambrou ; que la légende de Mambrou était, musique et paroles, la chanson que madame Poitrine chantait pour endormir son royal nourrisson, fils de Louis XVI, lorsque Marie-Antoinette la surprit, trouva l’air à son gré, et déclara vouloir le mettre à la mode ; qu’enfin le nom du duc de Marlborough (Churchill), le nom du général célèbre par la bataille de Malplaquet, ne prit la place du nom du très-modeste croisé Mambrou que par une grosse bévue.

Ces résultats d’une fine érudition une fois adoptés, les scènes de la grande place Esbékiéh n’ont plus rien d’extraordinaire : les Égyptiens furent émus quand on leur joua Marlborough, comme le sont les Suisses lorsqu’ils entendent le Ranz des vaches. Les souvenirs d’enfance ont le privilége de faire circuler la vie dans les natures les moins généreuses. Ajoutons que le Marlborough, admirablement exécuté par le nombreux orchestre de la place du Caire, devait avoir des charmes auxquels les musiciens barbares de l’Orient n’avaient pas accoutumé leurs auditeurs.

Monge eut toujours un goût très-prononcé pour la connaissance des étymologies, des origines, de la filiation