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pierres et de la charpente. Ils exécutaient encore de leurs mains, avec du plâtre gâché, des modèles de toutes les parties ou voussoirs qui composent les différentes espèces de voûtes en usage dans l’architecture civile et militaire. C’était par allusion à cet exercice si utile, et dont il eût été de bon goût de ne point parler avec dérision, que les élèves de l’école privilégiée avaient donné le nom de Gâche à l’école pratique.

Les élèves de la Gâche, pour parler ici comme les fils de famille, n’étaient astreints à aucune condition de naissance ou de fortune ; mais aussi, quelle que fût leur capacité, ils ne devaient jamais prétendre même au modeste grade de sous-lieutenant du génie. Les élèves de la première division, au contraire, n’étaient admis à l’examen qu’après avoir prouvé que leurs pères avaient vécu noblement, c’est-à-dire, car l’expression noblement appelle, je crois, un commentaire, sans s’être jamais livrés à aucun genre de commerce, à aucun genre d’industrie, à aucun genre de fabrication, celle des vitres et des bouteilles exceptée, la constitution du pays admettant alors des gentilshommes verriers. Je ne sais si l’officier qui décida Monge à se rendre à Mézières, avait espéré que le mérite de son jeune recommandé pourrait faire fléchir la règle ; en tout cas, il n’y eut pas d’exception : Jacques Monge de Beaune, n’ayant vécu ni de ses rentes, ni d’une fabrication quelconque de bouteilles, son fils Gaspard fut impitoyablement relégué dans la Gâche avec la perspective, en cas de grand succès, de veiller un jour en sous-ordre à la construction d’un bastion, d’une demi-lune ou d’une porte de ville.