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toire à Lyon n’avait que seize ans. Son enseignement eut toutefois un succès extraordinaire ; des manières affables, la patience d’un bénédictin, une conduite dans laquelle on aurait vainement cherché même de simples indices de l’esprit inconstant et léger qui semble le lot inévitable de la jeunesse, procurèrent à Monge autant d’amis que ses leçons lui avaient donné d’admirateurs. Les oratoriens désirèrent se l’affilier, et ne négligèrent pas de faire briller aux yeux du néophyte les services que, dans sa nouvelle position, il pourrait rendre à des parents chéris, à une famille nombreuse et sans fortune. Ces considérations devaient toucher le cœur de Monge ; aussi allait-il entrer dans les ordres, lorsqu’une lettre partie de Beaune renversa ce projet.

« Mon cher Gaspard, disait Jacques Monge à son fils, je n’ai pas le dessein de contrarier ta vocation, si elle est bien arrêtée ; mais je te dois une réflexion paternelle, tu la pèseras.

« Je suis persuadé qu’on commet une faute grave quand on entre dans une carrière quelconque autrement que par la bonne porte ; or, on m’assure que tes études littéraires n’ont pas été assez complètes pour ta carrière d’oratorien. Maintenant, c’est à toi de prononcer. »

Peu de jours après avoir reçu cette lettre, Monge était de retour dans sa ville natale.

Vous excuserez, Messieurs, ces minutieux détails ; je ne pouvais supprimer ce que notre confrère, comblé de dignités et de gloire, nous racontait avec tant d’émotion. J’aurais manqué à un devoir en ne consacrant pas quelques paroles à l’homme de bien, à l’homme au jugement