Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/384

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’Assemblée nationale, en termes pleins de sensibilité et i d’onction. Je serais coupable de les laisser dans l’oubli :

« Messieurs, les prisons sont remplies. L’innocent y attend sa justification ; le criminel la fin de ses remords. Tous y respirent un air malsain, et la maladie est près d’y prononcer des arrêts terribles. Le désespoir y habite, le désespoir y dit : Ou donnez-moi la mort, ou jugez-moi. Quand nous visitons ces prisons, voilà ce qu’entendent les pères des pauvres et des malheureux ; voilà ce que leur devoir est de répéter aux pères de la patrie. Nous devons leur dire que, dans ces asiles du crime, de la misère et de toutes les douleurs, le temps est infini dans sa durée : un mois est un siècle, un mois est un abîme dont la vue est épouvantée… Nous demandons des tribunaux qui vident les prisons par la justification de l’innocence, ou par des exemples de justice. »

Ne vous semble-t-il pas, Messieurs, que les temps de calme pourront aller quelquefois puiser d’excellentes leçons, et, ce qui ne gâte rien, des leçons exprimées en de très-bons termes, dans nos temps révolutionnaires ?



FUITE DU ROI. — ÉVÉNEMENTS DU CHAMP-DE-MARS.


Le mois d’avril 1791 vint apprendre à Bailly que son influence sur la population parisienne allait en déclinant. Le roi avait annoncé qu’il partirait le 18 et resterait quelques jours à Saint-Cloud. Des raisons de santé étaient la cause ostensible de ce départ. Des scrupules religieux étaient peut-être la cause réelle : la semaine sainte approchait, et le roi ne voulait point avoir de communications