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généralement que, le 13 juillet 1788, une grêle d’une grosseur et d’une abondance sans exemple ravagea complétement en quelques heures, sur deux zones parallèles fort larges, tout l’espace compris entre le département de la Charente et les frontières des Pays-Bas, et qu’à la suite de cette grêle effroyable, le grain manqua en partie, dans le nord et dans l’ouest de la France, jusqu’après la récolte de 1789.

La disette se faisait déjà fortement sentir, lorsque Bailly accepta, le 15 juillet, les fonctions de maire de Paris. Ce jour-là, il était résulté d’une visite faite à la halle et chez tous les boulangers, que les approvisionnements, en grains et farines, seraient entièrement épuisés en trois jours. Le lendemain, 16 juillet, tous les préposés à l’administration des subsistances avaient disparu. Cette fuite, conséquence naturelle de l’intimidation terrible qui planait sur ceux qui tenaient, de près ou de loin, aux approvisionnements, interrompait les opérations déjà commencées et exposait la ville de Paris à la famine.

Bailly, magistrat depuis un seul jour, réfléchit que la multitude n’entend rien, n’écoute rien lorsque le pain manque ; que la disette vraie ou supposée est le grand moyen des émeutes ; que toutes les classes de la population accordent leurs sympathies à quiconque crie : J’ai faim ; que ce cri lamentable réunit bientôt dans un sentiment commun de fureur aveugle, des individus de tout âge, de tout sexe, de toute condition ; qu’aucune puissance humaine ne saurait maintenir l’ordre et la tranquillité, au sein d’une population qui craint pour sa