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les fruits d’un travail si persévérant ; et d’Alembert va jusqu’à les taxer de pauvretés ; jusqu’à parler d’idées creuses, de vains et ridicules efforts ; jusqu’à appeler Bailly, à l’occasion de ses Lettres, le frère illuminé. Voltaire est, au contraire, convenable et très-académique dans ses rapports avec notre confrère. La renommée des brahmanes lui est chère ; mais cela ne l’empêche pas de discuter avec soin les preuves, les arguments de l’ingénieux astronome. C’est aussi à un examen sérieux qu’on pourrait se livrer aujourd’hui. Le voile mystérieux qui, du temps de Bailly, couvrait l’Orient, est en grande partie levé. Nous connaissons maintenant, dans tous ses détails, l’astronomie des Chinois et celle des Indous. Nous savons jusqu’à quel point ces derniers avaient poussé leurs connaissances mathématiques. La théorie de la chaleur centrale a fait en peu d’années des progrès inespérés ; enfin, la philologie comparée, prodigieusement étendue par les inappréciables travaux des Sacy, des Rémusat, des Quatremère, des Burnouf, des Stanislas Julien, a jeté de vives clartés sur des questions d’histoire et de géographie où régnait une obscurité profonde. Armé de tous ces nouveaux moyens d’investigation, on pourrait établir aisément que les systèmes relatifs à un ancien peuple inconnu, premier créateur de toutes les sciences, et à la patrie des Atlantes, reposent sur des fondements sans solidité. Cependant, si Bailly vivait encore, nous ne serions que justes en lui disant, comme Voltaire, avec la seule modification d’un temps du verbe : « Vos deux livres étaient, Monsieur, des trésors de la plus profonde érudition et des conjectures les plus ingénieuses, ornées d’un