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en toute hâte, la lunette d’un grand cercle gradué sur l’astre si impatiemment attendu. Ses lignes de repère sont des fils d’araignée. Si dans la visée il se trompe de la moitié de l’épaisseur d’un de ces fils, l’observation sera comme non avenue ; jugez de son inquiétude : dans le moment critique, une bouffée de vent faisant vibrer la lumière artificielle adaptée à la lunette, les fils deviennent presque invisibles ; l’astre lui-même, dont les rayons lui parviennent à travers des couches atmosphériques de densités, de températures, de réfringences variables, paraît osciller fortement, de manière que sa position réelle est presque in assignable ; au moment où une extrême netteté dans l’image serait indispensable pour assurer l’exactitude des mesures, tout devient confus, soit parce que les verres de l’oculaire se couvrent de vapeurs, soit parce que le voisinage d’un métal très-froid détermine, dans l’œil appliqué à la lunette, une abondante sécrétion de larmes : le pauvre observateur est donc exposé à cette alternative, d’abandonner à d’autres plus heureux la constatation d’un phénomène qui, peut-être, ne se reproduira pas de son vivant, ou d’introduire dans la science des résultats d’une exactitude problématique. Enfin, pour compléter l’observation, il faut consulter les divisions microscopiques du cercle gradué, et substituer à ce que les opticiens ont appelé la vision indolente, la seule dont les anciens eussent besoin, la vision tendue, qui, en peu d’années, conduit à la cécité.

Lorsqu’à peine sorti de cette torture physique et morale, l’astronome veut savoir ce que ses labeurs ont produit d’utile, il est obligé de se jeter dans des calculs