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M. de Maurepas se montre très-irrité d’une lettre, dirigée contre Necker, et dans laquelle se trouvaient des passages qui pouvaient nuire au crédit public. Cette lettre n’était pas de Condorcet. Le duc de Nivernais veut décider son confrère et ami à l’écrire au ministre ; il résiste avec une fermeté qui paraît inexplicable. Aujourd’hui je trouve l’explication dans une lettre inédite adressée à Turgot : « Le secrétaire de l’Académie éprouvait de la répugnance à assurer de son respect un homme qu’il était fort loin de respecter. »

Condorcet avouait les fautes, les erreurs qu’il avait pu commettre, avec une loyauté, un abandon que cette courte citation fera apprécier : « Connaissez-vous, lui disait-on un jour, les circonstances qui amenèrent la rupture de Jean-Jacques et de Diderot ? — Non, répondit-il ; je sais seulement combien Diderot était un excellent homme : celui qui se brouillait avec lui avait tort. — Mais vous-même ? — J’avais tort ! »

Dans l’édition donnée par l’auteur de Mérope des Pensées de Pascal, je trouve cette note de Condorcet : « L’expression honnêtes gens a signifié dans l’origine les hommes qui avaient de la probité ; du temps de Pascal, elle signifiait les gens de bonne compagnie ; maintenant on l’applique à ceux qui ont de la naissance ou de l’argent. — Non, monsieur, a dit Voltaire en s’adressant à l’annotateur, les honnêtes gens sont ceux à la tête desquels vous êtes ! »

Justifier cette exclamation, depuis qu’elle m’a semblé l’expression de la vérité, tel a dû être mon but principal