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l’Éloge de Michel de L’Hôpital. Entraîné par la beauté, par la grandeur du sujet, notre confrère se jeta étourdiment dans la lice, comme aurait pu le faire un jeune homme sans antécédents connus, sans réputation acquise. Il n’obtint pas le prix. On accorda la préférence à la pièce, aujourd’hui complétement oubliée, de l’abbé Rémi.

Il m’a été donné de retrouver quelques-unes des causes qui amenèrent cet échec. Peut-être méritent-elles de nous arrêter un instant.

Que désirait l’Académie française en proposant l’Éloge de L’Hôpital pour sujet de prix ? un aperçu sur les œuvres littéraires de l’illustre chancelier, une appréciation générale de ses actes politiques et administratifs ; un hommage à sa mémoire, écrit d’un style noble et soutenu. Aujourd’hui, ce genre de composition est peu goûté du public ; aussi, on se hasarderait presque à qualifier de discours à effet, d’amplification, ce que voulait la célèbre assemblée.

Ce n’est pas ainsi que Condorcet envisagera le thème qu’on lui présente. Dans son esprit, l’utilité prime tout autre genre de mérite. La vie de L’Hôpital lui semble pouvoir être offerte en exemple « à ceux qui, se trouvant placés dans des circonstances difficiles, auraient à choisir entre leur repos et le bonheur public. » Il n’hésite plus, c’est la vie de L’Hôpital qu’il écrira.

La vie de L’Hôpital ! mais c’est l’histoire d’un siècle affreux, d’une longue suite de concussions éhontées, de désordres, d’événements barbares, d’actes cruels d’intolérance, de fanatisme. Le cadre devient immense ; il ne