Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/148

Cette page a été validée par deux contributeurs.

hommes respirent, comme les aigles se soutiennent dans les airs.

Dans une lettre que j’ai sous les yeux, datée de 1769, d’Alembert se dépeignait à Lagrange en ces termes : « Il n’est pas trop dans ma nature de m’occuper de la même chose fort longtemps de suite. Je la laisse et je la reprends, autant de fois qu’il me vient en fantaisie, sans me rebuter, et pour l’ordinaire cette opiniâtreté éparpillée me réussit. »

Une troisième manière du génie me semble bien caractérisée par ce passage que je copie dans une note manuscrite de l’auteur de la Mécanique analytique :

« Mes occupations se réduisent à cultiver la géométrie, tranquillement, et dans le silence. Comme je ne suis pas pressé et que je travaille plutôt pour mon plaisir que par devoir, je ressemble aux grands seigneurs qui bâtissent : je fais, défais et refais, jusqu’à ce que je sois passablement content de mes résultats, ce qui néanmoins arrive très-rarement. »

Il était bon peut-être de montrer que la variété, que l’individualité existent dans les recherches mathématiques comme en toute autre chose ; que les voies les plus diverses peuvent également conduire un homme supérieur à trouver, dans les attractions mutuelles des corps célestes, la cause du changement d’obliquité de l’écliptique, la cause de la précession des équinoxes, et celle des mouvements de libration de la lune.

On s’est demandé, avec un sentiment de surprise bien naturel, comment Condorect renonça si facilement aux succès que la carrière scientifique lui promettait, pour se