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force de rédiger ses travaux de prédilection ; lui qui, dans une lettre, après avoir énuméré les nombreuses et bien réelles causes de chagrin dont il est assiégé, croit donner le dernier trait à ce triste tableau, quand il écrit : « Être assis immobile devant une table une plume à la main, c’est le plus pénible, le plus rude des métiers. » Ampère résistera donc aux demandes incessantes du commis, du chef de bureau, du chef de division et du ministre ligués contre lui ; mais dans cette lutte de tous les jours, et qui se prolongera jusqu’à l’époque des nouvelles inspections, il dépensera plus de temps, de finesse et d’esprit, qu’il ne lui en avait fallu pour créer un chapitre de ses théories électro-magnétiques.

Un si misérable emploi des plus hautes facultés intellectuelles n’aura de défenseurs ni dans cette enceinte, ni ailleurs ; mais, dira-t-on, où est le remède ? Le remède ne serait pas difficile à trouver : je voudrais que notre colossal budget n’oubliât pas que la France est avide de tous les genres de gloire ; je voudrais qu’il assurât une existence indépendante au petit nombre d’hommes dont les productions, dont les découvertes, dont les ouvrages commandent l’admiration et sont les traits caractéristiques des siècles ; je voudrais que ces puissances intellectuelles, dès qu’elles se sont manifestées, le pays les couvrît de sa protection tutélaire ; qu’il présidât à leur libre, à leur entier développement ; qu’il ne souffrît pas qu’on les usât sur des questions vulgaires. Les objections que ce projet pourrait faire naître, sont plus spécieuses que solides. Je les avais énoncées et combattues. Le défaut de temps m’oblige de renvoyer cette partie de mon travail à une