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voir la vaste étendue des réformes que ces grands principes amèneraient à leur suite, pour ne pas pressentir que la brillante carrière où il venait d’entrer, se fermerait peut-être à jamais devant lui. Voilà donc le jeune avocat du roi, dès son début dans la vie, obligé de mettre en balance les sentiments du citoyen et l’intérêt privé. Mille exemples pourraient faire croire qu’en pareille occurrence l’épreuve est toujours rude et le succès disputé ; hâtons-nous donc de déclarer que le patriotisme de Salverte l’emporta de haute lutte ; que notre collègue n’hésita pas un seul instant à se ranger parmi les partisans les plus vifs, les plus consciencieux de notre glorieuse régénération politique.

Lorsque, plus tard, des résistances coupables, lorsque l’insolente intervention de l’étranger, eurent jeté le pays dans de sanglants désordres, Salverte, avec tous les gens de bien, s’en affligea profondément. Il pressentit l’avantage qu’en tireraient, tôt ou tard, les ennemis de la liberté des peuples ; mais sa juste douleur ne le détacha pas de la cause du progrès. On le destitue des fonctions qu’il remplit au ministère des affaires étrangères ; il répond à cette brutalité imméritée par la demande d’examen pour un emploi d’officier du génie et une mission aux armées. Les préoccupations du temps font rejeter du service militaire le fils d’un fermier général. Salverte, sans se décourager, sollicite au moins la faveur d’être utile à son pays dans les carrières civiles : l’École des ponts et chaussées le compte alors parmi ses élèves ; et, bientôt après, parmi ses répétiteurs les plus zélés.

Notre ami subit, pendant ces temps de grandeurs