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qui se complaisent dans le danger : c’est une chose juste et utile ; mais livrer exclusivement une nation, la nation française, à qui se sent troublé, inquiet, embarrassé devant les grandes entreprises, ce serait un acte en complète disharmonie avec le caractère national ; ce serait jouer l’honneur, la gloire, la sécurité du pays sur un coup de dé.

Ne pourrait-on pas encore remarquer combien les hommes de notre temps sont enclins à chercher les richesses, même par des moyens qu’une stricte délicatesse réprouve, et conclure de là qu’une loi qui excite cette passion, en faisant de l’argent un élément indispensable pour arriver à l’illustration politique, pour être appelé à gouverner son pays, a dans ses conséquences immédiates quelque chose dont la morale peut s’inquiéter à bon droit ?

J’ajoute encore un mot en réponse à une objection qui s’est souvent reproduite. Je dis que celui qui vit de son travail journalier est plus intéressé encore que les propriétaires, que les capitalistes, à la tranquillité du pays. Les troubles, les bouleversements le plongent dans la plus profonde misère. Ceux qui l’occupaient sont atteints dans leur superflu ; l’ouvrier perd le plus strict nécessaire.

Voyez pourtant où on est arrivé, en voulant obstinément rattacher l’intelligence à deux centaines de francs de contributions ; on est arrivé jusqu’à vous dire « Celui qui, dans sa vie, n’a pas pu arriver à payer 200 fr. d’impôt ne sait pas faire ses affaires : ce serait donc à tort qu’on l’appellerait à gérer les affaires du pays. »

Messieurs, faire ses affaires est une expression vague ;