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racine dans le pays. Un de ses premiers actes fut le rappel de l’illustre exilé, et sa nomination au ministère de la guerre. L’ennemi était alors à nos portes. Carnot n’hésita pas à accepter ; mais peu de mois après, quand les immortelles victoires de Marengo et d’Hohenlinden eurent donné à nos armes une supériorité incontestable, lorsque l’indépendance du pays fut de nouveau assurée, Carnot se démit de ses fonctions. Il ne voulut pas consentir à paraître complice des changements qui se préparaient dans la forme du gouvernement. « Citoyens consuls, écrivait-il le 16 vendémiaire an ix, je vous donne de nouveau ma démission ; veuillez bien ne pas différer à l’accepter. »

Ce n’est pas avec cette sécheresse qu’on se sépare pour un léger dissentiment. La lettre que je viens de lire était le corollaire des vifs combats que la République et l’Empire se livraient déjà chaque jour dans les personnes du premier consul et du ministre de la guerre.

Rappelé aux affaires publiques, comme tribun, en 1802, Carnot s’oppose à la création de la Légion d’honneur. Il croit, j’allais dire il devine, qu’une distinction décernée sans enquête, par la volonté non contrôlée d’une seule personne, finira, malgré son titre fastueux, et d’après le cours naturel des choses de ce monde, par ne plus être qu’un moyen de se faire des créatures, et de réduire au silence une fourmilière de petites vanités. Carnot s’élève aussi de toutes ses forces contre l’érection du consulat à vie ; mais c’est surtout au moment où l’on propose de porter Bonaparte au trône impérial qu’il redouble d’ardeur et d’énergie. L’histoire a déjà recueilli ses nobles paroles ;