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votants avaient eu la hardiesse d’imiter Fontenelle, l’Institut n’eût pas subi, sous la Restauration, des mutilations cruelles ; privés de l’appui que leur donnaient de fâcheux précédents, plusieurs ministres n’auraient certainement pas eu l’inqualifiable pensée de créer à Paris une Académie des sciences sans Monge, une Académie des beaux-arts sans David !

Vous êtes étonnés, sans doute, que je n’aie pas encore fait connaître le nom du personnage qui succéda à Carnot dans la première classe de l’Institut ; eh ! Messieurs, c’est que j’ai reculé, tant que je l’ai pu, devant un devoir pénible. Quand il procédait au remplacement d’un de ses fondateurs, d’un de ses membres les plus illustres, l’Institut obéissait, du moins, à une loi formelle rendue par les pouvoirs de l’État ; mais est-il, je vous le demande, aucune considération au monde qui doive faire accepter la dépouille académique d’un savant victime de la rage des partis, et cela surtout lorsqu’on se nomme le général Bonaparte ? Comme vous tous, Messieurs, je me suis souvent abandonné à un juste sentiment d’orgueil en voyant les admirables proclamations de l’armée d’Orient signées : le membre de l’Institut, général en chef ; mais un serrement de cœur suivait ce premier mouvement, lorsqu’il me revenait à la pensée que le membre de l’Institut se parait d’un titre qui avait été enlevé à son premier protecteur et à son ami.

Je n’ai jamais cru, Messieurs, qu’il fût utile de créer, aux dépens de la vérité, des êtres d’une perfection idéale ; et voilà pourquoi, malgré quelques bienveillants conseils, j’ai persisté à divulguer ce que vous venez d’entendre sur