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se réfugia ensuite chez M. Oudot, grand partisan du coup d’État du 18 fructidor, et où, dès lors, personne ne se serait avisé de chercher le directeur proscrit. Carnot n’avait pas encore quitté Paris lorsqu’on le raya de la liste des membres de cet Institut national à la création duquel il avait tant contribué.

Des lois rendues les 19 et 20 fructidor an v déclaraient vacantes toutes les places occupées par les citoyens que le coup d’État du 18 avait frappés. Le ministre de l’intérieur, Letourneux, écrivit donc à l’Institut pour lui enjoindre de procéder au remplacement de Carnot. Les trois classes concouraient alors à la nomination des membres de chacune d’elles. Cent quatre votants prirent part au scrutin ; l’urne ne reçut aucun billet blanc !

Je sais, Messieurs, à quel point, en temps de révolution, les esprits les plus droits, les plus fermes, subissent l’influence de l’opinion publique ; je sais qu’a la distance qui nous sépare du 18 fructidor, personne ne peut se croire le droit de jeter le moindre blâme sur la condescendance que montra l’Institut pour les ordres ministériels ; toutefois, j’exprimerai ici franchement le regret que d’impérieuses circonstances n’aient pas permis à nos honorables devanciers de tracer, dès l’ère fructidorienne, une ligne de démarcation tranchée entre l’homme politique et l’homme d’étude. Sous la Régence, dans l’affaire de l’abbé de Saint-Pierre, Fontenelle avait déjà, par une boule courageuse, protesté contre cette prétention de tous les pouvoirs, de confondre ce que l’intérêt des sciences, des lettres, des arts, commande de tenir éternellement séparé. Si en l’an v de la République cinquante-trois