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engendré l’indiscipline. Pichegru nouait des trames criminelles avec le prince de Condé, se faisait battre à Heidelberg, compromettait l’armée de Jourdan, évacuait Manhein, levait le siége de Mayence, et livrait la frontière du Rhin aux Autrichiens. La guerre se rallumait en Vendée ; les Anglais nous menaçaient d’une descente dans les Pays-Bas et sur nos propres côtes ; enfin, à la frontière des Alpes, Schérer et Kellermann soutenaient avec désavantage une guerre défensive contre les forces réunies de l’empereur d’Autriche, du roi de Sardaigne et des princes italiens confédérés.

Il fallut, Messieurs, une grande force d’âme unie au plus ardent patriotisme, pour accepter, en de si cruelles circonstances, le fardeau des affaires publiques. Ajoutons que Carnot s’aveuglait si peu sur les vices de la Constitution de l’an iii, et surtout sur les inconvénients d’un pouvoir exécutif multiple, qu’il les avait publiquement signalés au sein de la Convention à l’époque où cette constitution fut discutée. « Les destinées de l’État, s’écriait-il alors, ne dépendront plus que du caractère personnel de cinq hommes. Plus ces caractères différeront, plus les vues des cinq directeurs seront dissemblables, et plus l’État aura à souffrir de leur influence alternative. » La majorité dédaigna ces justes appréhensions ; fidèle à une règle de conduite dont jamais on ne le vit se départir, Carnot se soumit sans murmure ; et dès que le nouveau gouvernement eut reçu la sanction légale, il le servit avec l’énergie, le zèle, le dévouement, qu’avait jadis déployés le membre du comité de salut public.

La Vendée était en feu ; Hoche reçoit de Carnot, avec