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Romain qu’il semblait que notre siècle eût dérobé aux plus heureux temps de la République ! »

L’éloge d’où ces deux passages sont tirés m’avait toujours paru si éloquent, si vrai, qu’au moment où, pour la première fois, je trouvai un discours sur Vauban parmi les productions de notre confrère, je me surpris à maudire de toute mon âme le programme académique qui, se jouant de l’inexpérience d’un jeune homme, l’avait exposé à une redoutable comparaison. En vérité, je n’aurais pas été plus inquiet si j’eusse découvert que Carnot avait essayé de refaire la Mécanique de Lagrange, Athalie, ou les Fables de La Fontaine. Ces craintes étaient exagérées. Les membres bourguignons de l’Académie de Dijon eurent raison de penser que le Bourguignon Vauban pouvait encore devenir un intéressant sujet d’étude, après le brillant portrait tracé par Fontenelle. Et, en effet, le secrétaire de l’Académie des sciences avait prudemment laissé dans l’ombre l’un des plus beaux côtés de l’illustre maréchal.

L’éloge de Vauban, sous la plume d’un officier du génie, semblait devoir consister principalement dans une appréciation exacte des moyens de défense et d’attaque dont l’illustre maréchal a doté l’art de la guerre. Ce ne fut pas cependant le plan qu’adopta Carnot. C’est surtout par les qualités du cœur, par les vertus, par le patriotisme, que Vauban lui semblait digne d’admiration : « C’était, s’écriait-il, un de ces hommes que la nature donne au monde tout formés à la bienfaisance ; doués, comme l’abeille, d’une activité innée pour le bien général ; qui ne peuvent séparer leur sort de celui de