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Son père, suivant les tristes exigences de l’époque, prouva de son côté que jamais un de ses navires n’avait été en de lointains pays échanger les fruits du sol français, de l’industrie française contre des productions réservées par la nature à d’autres climats ; que ses mains n’avaient point combiné les caractères mobiles de Gutenberg, fût-ce même pour reproduire la Bible ou l’Évangile ; qu’il n’avait personnellement concouru à l’exécution d’aucun de ces instruments admirables qui mesurent le temps ou sondent les profondeurs de l’espace.

Après la preuve légale de tous ces mérites négatifs, le jeune Carnot fut déclaré d’assez bonne maison pour porter l’épaulette, et il reçut, sans retard, celle de lieutenant en second.

Décoré de cette épaulette tant désirée, Carnot, âgé alors de dix-huit ans, se rendit à l’École du génie. Là, sous les auspices de Monge, il cultiva sans doute la géométrie descriptive et les sciences physiques avec ses succès habituels ; mais, il faut l’avouer, nous en sommes réduits sur ce point à de simples conjectures ; car, en poussant à l’extrême le désir naturel de dérober aux étrangers la connaissance, alors peu répandue, de l’art d’élever et de détruire les fortifications, on avait fait de la célèbre École de Mézières une sorte de conclave dont nul profane ne pénétrait jamais les secrets.