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agrandit les ressources de son pays,

accrut la puissance de l’homme,
s’éleva à une place éminente
parmi les savants les plus illustres
et les bienfaiteurs du monde.
Né à Greenock 1736,

Mort à Heathfield dans le Staffordshire 1819.


Voilà, de compte fait, cinq grandes statues élevées en peu de temps à la mémoire de Watt. Faut-il l’avouer ? Ces hommages de la piété filiale, de la reconnaissance publique, ont excité la mauvaise humeur de quelques esprits rétrécis qui, en restant stationnaires, croient arrêter la marche des siècles. À les en croire, des hommes de guerre, des magistrats, des ministres (je dois avouer qu’ils n’ont pas osé dire tous les ministres), auraient droit à des statues. Je ne sais si Homère, si Aristote, si Descartes, si Newton, paraîtraient à nos nouveaux Aristarques dignes d’un simple buste ; à coup sûr ils refuseraient le plus modeste médaillon aux Papin, aux Vaucanson, aux Watt, aux Arkwright et à d’autres mécaniciens, inconnus peut-être dans un certain monde, mais dont la renommée ira grandissant d’âge en âge avec les progrès des lumières. Lorsque de semblables hérésies osent se produire au grand jour, il ne faut pas dédaigner de les combattre. Ce n’est point sans raison qu’on a appelé le public une éponge à préjugés ; or, les préjugés sont comme les plantes nuisibles : le plus petit effort suffit pour les extirper si on les saisit à leur naissance ; ils résistent, au contraire, quand on leur a laissé le temps de croître, de s’étendre, de saisir dans leurs nombreux replis tout ce qui se trouvait à leur portée.