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de grandir et de se propager ? Ce nouvel aveu me coûtera peu. Quelqu’un présenta-t-il les machines comme une panacée universelle ? Soutint-on jamais qu’elles auraient le privilège inouï d’écarter l’erreur et la passion des assemblées politiques ; qu’elles dirigeraient les conseillers des princes dans les voies de la modération, de la sagesse, de l’humanité ? Prétendit-on qu’elles détourneraient Pitt de s’immiscer sans relâche dans les affaires des pays voisins ; de susciter chaque année, et sur tous les points de l’Europe, des ennemis à la France ; de leur payer de riches subsides, de grever enfin l’Angleterre d’une dette de plusieurs milliards ? Voilà, voilà pourquoi la taxe des pauvres s’est si vite et si prodigieusement accrue. Les machines n’ont pas produit, n’ont pas pu produire ce mal. J’ose même affirmer qu’elles l’ont beaucoup atténué, et je le prouve en deux mots. Le comté de Lancastre est le plus manufacturier de toute l’Angleterre. C’est là que se trouvent les villes de Manchester, de Preston, de Bolton, de Warrington, de Liverpool ; c’est dans ce comté que les machines ont été le plus brusquement, le plus généralement introduites. Eh bien, répartissons la totalité de la valeur annuelle de la taxe des pauvres du Lancashire, sur l’ensemble de la population ; cherchons, en d’autres termes, la quote-part de chaque individu, et nous trouverons un résultat près de trois fois plus petit que dans la moyenne de tous les autres comtés ! Vous le voyez, les chiffres traitent sans pitié les faiseurs de systèmes. Au reste, que ces grands mots de taxe des pauvres ne nous fassent pas croire, sur la foi de quelques déclamateurs, que chez nos voisins les classes laborieuses sont