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légiste. Les incidents des longs et dispendieux procès que Boulton et Watt eurent à soutenir, et qu’en définitive ils gagnèrent, ne mériteraient guère aujourd’hui d’être exhumés ; mais puisque tout à l’heure j’ai cité Burke parmi les adversaires du grand mécanicien, il semble juste de rappeler que, par compensation, les Roy, les Mylne, les Herschel, les Deluc, les Ramsden, les Robison, les Murdock, les Rennie, les Cumming, les More, les Southern allèrent avec empressement soutenir devant les magistrats les droits du génie persécuté. Peut-être aussi sera-t-il bon d’ajouter comme un trait curieux dans l’histoire de l’esprit humain, que les avocats (j’aurai la prudence de faire remarquer qu’il ne s’agit ici que d’avocats d’un pays voisin), que les avocats, à qui la malignité impute un luxe surabondant de paroles, reprochaient à Watt, contre lequel ils s’étaient ligués en grand nombre, de n’avoir inventé que des idées. Ceci, pour le dire en passant, leur attira, devant le tribunal, cette apostrophe de M. Rous « Allez, Messieurs, allez vous frotter à ces combinaisons intangibles, ainsi qu’il vous plaît d’appeler les machines de Watt, à ces prétendues idées abstraites ; elles vous écraseront comme des moucherons, elles vous lanceront dans les airs à perte de vue ! »

Les persécutions que rencontre un homme de cœur, là où la plus stricte justice lui permettait d’espérer des témoignages unanimes de reconnaissance, manquent rarement de le décourager et d’aigrir son caractère. L’heureux naturel de Watt ne résista pas à de telles épreuves. Sept longues années de procès avaient excité en lui un sentiment de dépit, qui se faisait jour quelquefois dans des