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lement célèbre. Eh bien ! neuf années se seront à peine écoulées, et vous le trouverez à la tête de l’Institut d’Égypte, et il sera l’oracle, l’idole d’une compagnie qui comptait parmi ses membres, Bonaparte, Berthollet, Monge, Malus, Geoffroy Saint-Hilaire, Conté, etc. ; et sans cesse les généraux se reposeront sur lui du soin de dénouer des difficultés en apparence insolubles, et l’armée d’Orient elle-même, si riche dans tous les genres d’illustrations, ne voudra pas d’autre interprète quand il faudra raconter les hauts faits du héros qu’elle venait de perdre.

Ce fut sur la brèche d’un bastion récemment enlevé d’assaut par nos troupes, en vue du plus majestueux des fleuves, de la magnifique vallée qu’il féconde, de l’affreux désert de Libye, des colossales pyramides de Gizeh ; ce fut en présence de vingt populations d’origines diverses que le Kaire réunit dans sa vaste enceinte, devant les plus vaillants soldats qui jamais eussent foulé une terre où, cependant, les noms d’Alexandre et de César retentissent encore ; ce fut au milieu de tout ce qui pouvait émouvoir le cœur, agrandir les idées, exciter l’imagination, que Fourier déroula la noble vie de Kléber. L’orateur était écouté avec un religieux silence ; mais bientôt, désignant du geste les soldats rangés en bataille devant lui, il s’écrie : « Ah ! combien de vous eussent aspiré à l’honneur de se jeter entre Kléber et son assassin ! Je vous prends à témoin, intrépide cavalerie qui accourûtes pour le sauver sur les hauteurs de Koraïm, et dissipâtes en un instant la multitude d’ennemis qui l’avaient enveloppé ! » À ces mots un frémissement électrique agite l’armée tout entière ; les