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largeur d’idées fut conçue la réforme des poids et mesures ; quels géomètres, quels astronomes, quels physiciens éminents présidèrent à toutes les parties de ce grand travail ! Hélas ! d’affreux déchirements intérieurs vinrent bientôt assombrir ce magnifique spectacle. Les sciences ne pouvaient prospérer au milieu du combat acharné des factions. Elles eussent rougi de rien devoir aux hommes de sang, dont les passions aveugles immolèrent les Saron, les Bailly, les Lavoisier.

Peu de mois après le 9 thermidor, la Convention voulant ramener le pays vers des idées d’ordre, de civilisation et de progrès intérieurs, songea à organiser l’instruction publique ; mais où trouver des professeurs ? Les membres laïques du corps enseignant, devenus officiers d’artillerie, du génie ou d’état-major, combattaient aux frontières les ennemis de la France. Heureusement, dans cette époque d’exaltation intellectuelle, rien ne semblait impossible. Les professeurs manquaient, on décréta qu’il en serait créé sans retard, et l’École normale naquit. Quinze cents citoyens de tout âge, présentés par les chefs-lieux de district, s’y trouvèrent aussitôt réunis, non pour étudier, dans toutes leurs ramifications, les diverses branches des connaissances humaines, mais afin d’apprendre, sous les plus grands maîtres, l’art d’enseigner.

Fourier était l’un de ces quinze cents élèves. On s’étonnera, non sans quelque raison, je l’avoue, quand je dirai qu’il fut élu à Saint-Florentin, et qu’Auxerre parut insensible à l’honneur d’être représentée à Paris par le plus illustre de ses enfants. Mais cette indifférence sera comprise ; ensuite s’écroulera sans retour le laborieux échafaudage