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sigea avec les passions basses, cupides, sanguinaires, qui surgissaient de toutes parts.

Membre de la Société populaire d’Auxerre, Fourier y exerçait un ascendant presque irrésistible. Un jour, la Bourgogne tout entière en a conservé le souvenir, à l’occasion de la levée de trois cent mille hommes, il fit vibrer si éloquemment les mots d’honneur, de patrie, de gloire ; il provoqua tant d’enrôlements volontaires, que le tirage au sort devint inutile. À la voix de l’orateur, le contingent assigné au chef-lieu de l’Yonne se forma, se réunit spontanément dans l’enceinte même de l’assemblée, et marcha sur-le-champ à la frontière. Malheureusement, ces luttes du forum dans lesquelles s’usaient alors tant de nobles vies, étaient loin d’avoir toujours une importance réelle. De ridicules, d’absurdes, de burlesques motions, y heurtaient sans cesse les inspirations d’un patriotisme pur, sincère, éclairé. La société populaire d’Auxerre nous fournirait, au besoin, plus d’un exemple de ces désolants contrastes. Ainsi je pourrais dire que, dans la même enceinte où Fourier sut exciter les honorables sentiments que j’ai rappelés avec bonheur, il eut, une autrefois, à combattre certain orateur, peut-être bien intentionné, mais assurément mauvais astronome, lequel voulant échapper, disait-il, au bon plaisir des administrateurs municipaux, demandait que les noms de quartiers du Nord, de l’Est, du Sud, de l’Ouest, fussent assignés aux diverses parties de la ville d’Auxerre, par la voie du sort.

Les lettres, les beaux-arts, les sciences, semblèrent un moment devoir ressentir aussi l’heureuse influence de la révolution française. Voyez, par exemple, avec quelle