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venu, et qui auraient figuré d’une manière assez ridicule sur le titre de cet ouvrage colossal.

Young n’eut donc jamais, comme praticien, ni à Londres, ni à Worthing où il passait la saison des bains de mer, une clientèle très-étendue. Le public le trouvait trop savant ! On doit même avouer que ses cours de médecine, le cours, par exemple, qu’il faisait à l’hôpital de Saint-Georges, furent généralement peu suivis. Quelqu’un a dit, pour l’expliquer, que ses leçons étaient trop pleines, trop substantielles, qu’elles dépassaient la portée des intelligences ordinaires ! Ne pourrait-on pas plutôt attribuer ce défaut de succès à la franchise, peu commune, que Young mettait à signaler les difficultés inextricables qui se rencontrent à chaque pas dans l’étude des nombreux désordres de notre frêle machine ?

Pense-t-on que, à Paris, à une époque surtout où chacun veut arriver au but, vite et sans fatigue, un professeur de faculté conservât beaucoup d’auditeurs, s’il débutait par ces paroles que j’emprunte textuellement au docteur Young :

« Aucune étude n’est aussi compliquée que celle de la médecine. Elle surpasse les bornes de l’intelligence humaine. Les médecins qui se précipitent en avant, sans essayer de comprendre ce qu’ils voient, sont souvent aussi avancés que ceux qui se livrent à des généralisations hâtives appuyées sur des observations à l’égard desquelles toute analogie est en défaut. »

Et si le professeur, continuant sur le même ton, ajoutait : « Dans les loteries de la médecine, les chances du possesseur de dix billets doivent être évidemment