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nières profondeurs de la science, il a été méconnu de la foule ; mais les applaudissements de quelques hommes d’élite auraient dû le dédommager. En pareille matière, on ne doit pas compter les suffrages, il est plus sage de les peser.


INTERFÉRENCES.


La plus belle découverte du docteur Young, celle qui rendra son nom à jamais impérissable, lui fut suggérée par un objet en apparence bien futile ; par ces bulles d’eau savonneuse, si vivement colorées, si légères, qui, à peine échappées du chalumeau de l’écolier, deviennent le jouet des plus imperceptibles courants d’air. Devant un auditoire aussi éclairé, il serait sans doute superflu de remarquer que la difficulté de produire un phénomène, sa rareté, son utilité dans les arts, ne sont pas les indices nécessaires de l’importance qu’il doit avoir dans la science. J’ai donc pu rattacher à un jeu d’enfant la découverte que je vais analyser avec la certitude qu’elle ne souffrirait pas de cette origine. En tout cas, je n’aurais besoin de rappeler ni la pomme qui, se détachant de sa branche et tombant inopinément aux pieds de Newton, éveilla les idées de ce grand homme sur les lois simples et fécondes qui régissent les mouvements célestes ; ni la grenouille et le coup de bistouri, auxquels la physique a été récemment redevable de la merveilleuse pile de Volta. Sans articuler, en effet, le nom de bulles de savon, je supposerais qu’un physicien eût choisi pour sujet de ses expériences l’eau distillée, c’est-à-dire un liquide qui dans son état de pureté, ne se revêt de quelques légères