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PILE VOLTAÏQUE


J’arrive maintenant à l’une de ces rares époques dans lesquelles un fait capital et inattendu, fruit ordinaire de quelque heureux hasard, est fécondé par le génie, et devient la source d’une révolution scientifique.

Le tableau détaillé des grands résultats qui ont été amenés par de très-petites causes ne serait pas moins piquant, peut-être, dans l’histoire des sciences que dans celle des nations. Si quelque érudit entreprend jamais de le tracer, la branche de la physique actuellement connue sous le nom de galvanisme y occupera une des premières places. On peut prouver, en effet, que l’immortelle découverte de la pile se rattache, de la manière la plus directe, à un léger rhume dont une dame bolonaise fut attaquée en 1790, et au bouillon aux grenouilles que le médecin prescrivit comme remède.

Quelques-uns de ces animaux, déjà dépouillés par la cuisinière de madame Galvani, gisaient sur une table, lorsque, par hasard, on déchargea au loin une machine électrique. Les muscles, quoiqu’ils n’eussent pas été frappés par l’étincelle, éprouvèrent, au moment de sa sortie, de vives contractions. L’expérience renouvelée réussit également bien avec toute espèce d’animaux, avec l’électricité artificielle ou naturelle, positive ou négative.

Ce phénomène était très-simple. S’il se fût offert à quelque physicien habile, familiarisé avec les propriétés du fluide électrique, il eût à peine excité son attention. L’extrême sensibilité de la grenouille, considérée comme élec-