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Je vais rapporter un fait curieux et qui montrera que la politique, qui s’infiltre dans l’intérieur des familles les plus unies et y porte la discorde, était parvenue, chose extraordinaire, à pénétrer jusque dans le bagne d’Alger. Les esclaves appartenaient à trois nations ; il y avait, en 1809, dans ce bagne, des Portugais, des Napolitains et des Siciliens ; dans ces deux dernières classes, on comptait les partisans de Murat et les partisans de Ferdinand de Naples. Un jour, au commencement de l’année, un drogman vint, au nom du dey, inviter M. Dubois-Thainville à se rendre sans retard au bagne, où les amis des Français et leurs adversaires se livraient un combat acharné ; déjà plusieurs avaient succombé. L’arme avec laquelle ils se frappaient était la grosse et longue chaîne attachée à leurs jambes.


XXXVII.


Chaque consul, ainsi que je l’ai dit plus haut, avait un janissaire préposé à sa garde ; celui du consul de France était Candiote ; on l’avait surnommé la Terreur. Toutes les fois que, dans les cafés, on annonçait quelque nouvelle défavorable à la France, il venait s’informer au consulat de la vérité du fait, et lorsque nous lui avions déclaré que les autres janissaires avaient propagé une nouvelle fausse, il allait les rejoindre, et là, le yatagan à la main, déclarait vouloir combattre en champ clos ceux qui soutiendraient encore l’exactitude de la nouvelle. Comme ces menaces incessantes pouvaient le compromettre, car elles ne s’appuyaient que sur son courage de