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SEPT NOUVELLES D’ARÉTIN

torche, qui s’éteignit. Le misérable, mordu et égratigné, crut que l’enfer allait l’engloutir ; il se sauva comme il put, promettant à Dieu de se faire ermite. Enfin le chat l’abandonna. Il ne tint pas d’ailleurs sa promesse ; mais il raconta une fois à un ami, qui m’en a fait le conte, un tour divertissant que le diable joua à un pieux solitaire dont l’austérité était telle qu’il était inaccessible à toutes les tentations. L’enfer entier s’était mis à l’œuvre pour le faire tomber en faute ; mais ni les richesses, ni les promesses des plus hautes dignités, ni les appétits de la chair, ne pouvaient rien sur lui. Enfin, un petit diable des plus malins s’écria : « Sois sûr, Satan, qu’avant que ne vienne le jour de demain ce prétendu saint sera des nôtres. » Il dit, et se transforma en un jeune berger touchant à l’adolescence, et le voilà frappant à la porte de l’ermitage, au milieu d’un ouragan terrible de vent, de pluie et de grêle. Il appelle au secours d’une voix tremblante qui aurait ému de compassion l’homme le plus barbare. Le saint homme l’entendit, mais il se défiait des embûches du démon, et il fut longtemps sans se décider à ouvrir sa porte. Enfin l’amour du prochain l’emporta, et il laissa entrer chez lui le soi-disant berger. C’était chose risible de voir comment monsieur le diable fermait les yeux, afin de ne pas voir les signes de croix que faisait le solitaire, et celui-ci ne remarqua point que l’étranger se bouchait les oreilles avec les doigts : c’était pour ne pas entendre prononcer le nom du Seigneur. Une brassée de sarments