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ET SUR DIVERS CONTEURS ITALIENS.

l’imagination, ne touche le cœur. Roscoe a traduit dix contes de Sacchetti. L’un d’eux (le second sonnet du recueil italien) a plusieurs fois été imité et ne manque pas de sel. Un abbé, qui avait déplu au gouverneur de Milan, est condamné à payer une amende, à moins qu’il ne réponde à quatre questions : « Quelle est la distance de la terre au ciel ? Quelle est la quantité d’eau qu’il y a dans la mer ? Que font les habitants des régions infernales ? Quelle est la valeur de la personne du gouverneur lui-même ? » L’abbé, qui n’est nullement un Œdipe, demande que le meunier du couvent le remplace dans la solution de ces problèmes. Ce meunier est un drôle fort intelligent, encore plus impudent. À la première question il répond froidement que la distance de la terre au ciel est exactement de trente six millions huit cent cinquante quatre lieues, soixante douze toises et deux pieds ; s’il y a quelques doutes à cet égard, il demande que la difficulté soit soumise à des arbitres. Il donne des réponses semblables à la seconde et à la troisième question. Quant à la quatrième, il évalue le gouverneur à la somme de deux sous et cinq deniers ; et comme ce fonctionnaire est irrité d’une semblable estimation, le meunier lui fait observer que, Jésus-Christ ayant été vendu pour trente deniers, un chrétien n’a certes pas le droit de se plaindre s’il est évalué vingt-neuf.

La 132e nouvelle de Sacchetti a peut-être été connue de Cervantes, car l’aventure du frère