Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.

perdu dans un rêve, avec quelque chose de la résignation à la fois heureuse et terrifiée de la Pythonisse qui va monter sur son trépied.

Un matin on ne vit pas le petit porteur d’huîtres. Les gens s’étonnèrent d’abord parce que la saison des huîtres n’était pas finie. Puis, son absence se prolongeant, l’étonnement fit place à l’inquiétude.

Interrogé, le patron qui d’ailleurs avait fait fortune en ces quelques mois, répondit assez vaguement que le petit était retourné au pays, chez sa mère… que rien n’est fatigant à cet âge comme de monter des huîtres tout le temps, qu’il avait besoin de l’air de la campagne, et que peut-être il ne reviendrait plus.

Alors, — car personne ne pouvait se contenter d’une explication aussi simple, — les commentaires allèrent leur train. Il courut des bruits d’enlèvement et de départ pour l’Italie avec une princesse de théâtre ou une grande dame russe. Les uns tenaient pour la comédienne, les autres pour la grande dame, mais tous étaient d’accord sur la question d’enlèvement.

Peu à peu cependant l’opinion générale s’établit que le petit porteur d’huîtres était mort, comme meurent ceux qui furent aimés des dieux, par un beau soir, à la fleur de l’âge. Sa perte fut longuement pleurée. Et même un poète qui savait le latin lui composa cette épitaphe