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main ! songez à demain ; c’est demain la fin, c’est demain la mort ! »

Retournons bien vite contre le mur cette chrétienne et terrifiante image.

Mon corbeau, sur l’arbre d’en face, fait « Cras !… cras !… cras !… » lui aussi ; mais c’est tout autrement que son « Cras !… » s’interprète : son « Cras !… » est joyeux, son « Cras !… » est païen, et voici ce qu’il semble dire :

— « Cras !… cras !… » demain le printemps naît. Un frisson a couru les bois, et les arbres où la sève monte, prêts à verdir, prêts à fleurir, laissent pendre plus bas leurs branches alourdies. Quelques abeilles se réveillent et volent aux chatons des saules. On pourrait presque faire un bouquet. Dans les mousses dont le velours sombre se hérisse de raides fils d’or, voici la première renoncule ; voici l’arum au cornet tigré, les violettes, les pâquerettes, l’épi pourpré des pulmonaires, et, féminine comme son nom, la frêle anémone Sylvie. Bientôt, sous les fourrés pleins d’ombre, ce sera le tour des muguets, des jacinthes ; les robes claires s’y égareront, et l’on entendra des conversations à voix basse, des conversations d’amants épris, qui se tairont subitement, effarouchés par le vol d’une tourterelle ou le brusque sifflet d’un merle.

Heureux alors celui à qui la fortune interdit