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Il portait sur la tête, ainsi qu’un pâtissier porterait sa tourte, une corbeille d’azalées ; et les fleurs, au rythme de la marche, au souffle d’un vent léger qui se levait se balançaient lentement, doucement, comme endormies.

Tout à coup le jardinier heurta du pied contre un caillou et trébucha. Que voulez-vous ? le printemps sans doute lui donnait aussi des distractions à cet homme ! Il trébucha et la corbeille, savamment maintenue en équilibre, ne se renversa point ! Mais un brin fragile fut détache par la secousse et tombant le long du trottoir dans le sable, il brillait de loin comme un chiffon rosé.

J’aurais pu le ramasser ; je me décidai à n’en rien faire, curieux de savoir ce qu’allaient devenir sur un boulevard, en plein Paris, ces fleurs tombées. Il y a comme cela des jours où il est doux de se donner pour soi tout seul de paresseuses comédies.

Mes fleurs n’attendirent pas longtemps.

De l’autre côté de la chaussée, deux témoins, un garçonnet de quinze ans, une fillette de quatorze, avaient assisté à la chose : lui, sans doute apprenti typographe, car il était tout de bleu vêtu avec un peu de noir aux manches ; elle, fleuriste ou brunisseuse, car d’impalpables paillons d’or frémissaient et luisaient dans le blond ardent de ses cheveux. Voyant que je ne bougeais pas, ils approchèrent. Le garçon se