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Deux masques sur la place Saint-Sulpice, pareille, comme vous savez, à un coin de la Rome papale, avec sa grande façade aux ordres superposés, où un ciel d’hiver extraordinairement bleu, vrai ciel Véronèse, se découpait dans les tours à jours de l’architecte Servandoni ; avec sa fontaine au dôme écussonné de chapeaux cardinalices, où, jaillissant sous les pieds des Fénélon et des Bossuet en marbre, de belles eaux claires, qui semblent bénites, arrosent le dos de lions fâchés ; avec son séminaire froid comme une prison, dont les murs de jardin sont si hauts que les charmilles taillées les dépassent à peine.

Oui ! deux masques de Mardi-Gras, l’après-midi, sur cette place solitaire, éternellement résonnante du son des cloches, que peuplent seuls, de loin en loin, un curé de province bilieux et pressé, un missionnaire à barbe, la soutane doublée de violet d’un monsignore, ou bien, traversant les yeux baissés l’angle de la place entre l’église et le séminaire, une théorie blanche et noire de jeunes lévites en surplis.

Deux masques, deux fillettes charmantes et vêtues de rouge, lesquelles, à en juger par les taillades de leurs chausses, les bouffettes romantiques de leurs pourpoints et les mignonnes cornes d’or qu’elles portaient au front, devaient avoir dépensé une assez forte somme d’imagination à se déguiser convenablement en Monsieur et Madame le Diable.