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précédée d’un jardin et sans concierge dont, en ses jours de pauvreté, il avait eu longtemps envie. C’est à peine si, de loin en loin, pressé par la nécessité des relations ou des affaires, il se permettait sur la grand’ville grouillante et bruyante comme un camp, ce qu’il appelait ses sorties d’assiégé.

Depuis deux ans, trois ans peut-être, Eustache et Du Laus s’étaient à peine vus.

Pourquoi faire alors ce ton pressant, ce déjeuner et ce dîner, cette main-mise de toute une journée ?

Avec un autre que Du Laus, Eustache aurait rêvé duel. Tout bien pesé, il s’arrêta à l’idée plus sage d’un revenez-y d’affection, du besoin instinctif qui vous prend de revoir tout à coup un camarade longtemps négligent ou négligé, car les amitiés ont de ces fringales.

Voilà ce que se dit Eustache avant de s’endormir, et ce qu’il se disait encore le lendemain en s’arrêtant devant une petite porte à clairevoie qui laissait apercevoir par ses trous une avenante maison blanche, au fond d’un jardin planté de groseillers sans feuilles et de chrysanthèmes flétris par l’hiver, avec l’inévitable allée de poiriers noirs et bossus, poiriers citadins sur lesquels poussent, les bonnes années quelques rares poires à goût de bois que l’amour-propre du propriétaire et la courtoisie des convives déclarent exquises, bien que leur chair à