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Nazaire essaya de s’expliquer.

— « Suffit, rompez ! Qui m’a fichu ce particulier ? »

Et, se faisant aider par le fort demeuré témoin de la scène, il chargea le bœuf sur le dos du malheureux Nazaire.

Nazaire partit, titubant, se cognant aux murs, excitant les huées et le rire des gens qu’il heurtait au passage. Un peu inquiet sur la fin de l’aventure, il était fier pourtant de porter un tel poids ; des souvenirs classiques lui revenaient et il se comparait à Milon de Crotone.

Un de ces gavroches qui pullulent autour des Halles, vivant de rogatons ramassés et de sous gagnés à faire de vagues commissions, lui dit :

— « Patron, si par hasard votre bœuf vous gênait, je pourrais pour cinq sous vous indiquer un boucher pas loin. »

Nazaire accepta d’autant plus volontiers que, courbé sous le faix, avec un lambeau sanglant qui lui flottait devant les yeux, il n’aurait pu que difficilement lire les enseignes.

Mais de tous les bouchers auxquels Nazaire s’adressa, aucun ne voulut de son bœuf.

Les uns avaient leur provision, d’autres croyaient à une farce et refusaient le bœuf même pour rien. Un dernier, qui comprit, se répandit en violentes injures contre les avares bourgeois qui viennent s’approvisionner aux Halles pour