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Nazaire qui venait de vendre une toile la veille avait heureusement de l’argent sur lui. Il paya, se disant qu’après tout l’affaire n’était pas si mauvaise et qu’il pourrait toujours revendre son quart de bœuf avec bénéfice, non sans avoir prélevé dessus le pot-au-feu pour Caroline.

Il n’eut pas d’ailleurs le temps de beaucoup réfléchir.

Un fort s’était emparé autoritairement du quart de bœuf et demandait à Nazaire, une fois hors du pavillon :

— « À quelle voiture faut-il que je porte votre marchandise ?

— Mais, répondit Nazaire, je n’ai pas de voiture. »

Croyant sans doute voir un fou dans cet homme qui n’avait pas de voiture et qui achetait des cinquante kilos de bœuf, le fort d’un brusque coup d’épaule jeta le bloc de viande le long du mur, et, tendant la main :

— « Arrangez-vous. C’est deux sous seulement pour la peine. »

Nazaire donna les deux sous et, brisé par tant d’émotions, s’assit un instant sur son bœuf, dans une pose méditative.

Un sergent de ville vint secouer sa rêverie :

— « Ah ça, est-ce que nous allons moisir ici ? »