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Mais Marc-Antoine à ce moment ne songeait pas à sa couronne ; Marc-Antoine tisonnait toujours :

— « La vie est drôle, n’est-ce pas ?… Qui diantre nous eût prédit que tu me retrouverais ainsi, par hasard, en exil volontaire, au fond d’une province perdue !

Comment la chose s’est faite, je l’ignore.

Un beau matin, l’idée me vint de partir. Oh ! pas pour longtemps, un mois tout au plus. J’étais las de Paris, de sa fièvre, du travail quotidiennement imposé à l’artiste, et de cette interminable suite de semaines sans dimanches, où jamais ne luit comme pour l’ouvrier l’éclaircie gaie d’un jour de loisir…

Je m’arrêtai ici sur la foi de l’indicateur des chemins de fer, uniquement parce que le nom du pays me plaisait. Un pays à souhait pour l’apaisement et l’oubli : des rivières lentes, des saules, des lignes de collines toujours un peu brumeuses et voilées !… Sais-tu ce qui d’abord et par dessus tout me séduisit ? C’est qu’enfin — sensation particulièrement délicieuse au sortir de l’infernal grondement parisien où mille clameurs se fondent et se confondent, — j’entendais de vrais bruits dans une atmosphère de silence, des bruits caractéristiques et distincts : une cloche, un tintement d’enclume, le battoir d’une lavandière, et, sur les coteaux, à l’automne, le coup de fusil d’un chasseur.