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Il y avait donc une fois, pas loin d’ici, et même tout près, à la métairie des Borgneux, une fillette de sept ans, un peu moins belle que le jour, et qu’on appelait La-Mal-Rentée parce que, venue de Paris, ses parents avaient quelquefois oublié de payer ses mois de nourrice.

N’importe, les Borgneux avaient confiance et la gardaient, la traitant ni mieux ni plus mal que si elle eût été leur propre fille… Et je me vois encore…

— C’était donc vous ?

— Oui !… Je me vois encore l’hiver, en sabots, maigrelette, tout ébouriffée, suivant le chemin de l’école avec une bûche sous le bras, et, sur le dos, en sac de soldat, ficelé solidement, un pain d’une livre. C’était la provision de la journée ; or comme je mangeais toujours mon pain en route, comme l’instituteur s’était plaint, mes nourriciers avaient imaginé de me le faire porter ainsi afin que je ne pusse y atteindre.

La chose m’ennuyait à cause des railleries des petits gars, mes camarades, et aussi parce que, quelquefois, les chiens de ferme me suivaient.

Un jour Turc, qui me connaissait, ne se contenta pas de me suivre. Je passais ici, devant l’auberge. Turc vint gambader autour de moi, et, comme je voulais fuir, posant ses deux grosses pattes sur mes épaules, il me jeta par