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JEAN-DES-FIGUES.


comme ceux de Polichinelle ; un gilet pourpre sur la poitrine, et dans le dos un pourpoint superbe fait du plus magnifique velours bleu.

Quelle affaire le jour où je partis ! Blanquet, ce jour-là, était encore plus beau que moi, tout harnaché de blanc avec des houppes de laine rouge et bleue. Ravi de se voir si bien vêtu, il faisait bonne mine sous la charge.

— Écoute ceci, Jean-des-Figues : si tu as soif, tu boiras un coup à la gourde… et l’on attachait la gourde au trou du bât.

— Jean-des-Figues, quand tu auras faim, vous vous arrêterez à un arbre, tu mangeras un morceau en laissant Blanquet paître… et près de la gourde on suspendait un grand sac bourré de figues sèches.

— Jean-des-Figues, si une fois tu as sommeil… Au bout d’un quart d’heure de ces recommandations, Blanquet avait autour de lui autant de paquets qu’un mauvais nageur a de vessies.

Enfin j’embrassai les amis, et maître Cabridens fort tendrement en songeant à Reine qui n’était point venue. Cela dura une demi-heure ; tout le monde pleura, ma mère me pendit au cou une médaille bénite ; mon père, d’un air bourru, me glissa une bourse ronde dans la ceinture :

— Sois sage, Jean… puis : Arri, Blanquet ! et voilà Jean-des-Figues parti pour la gloire.

Quand je fus au milieu du pont de pierre, d’où l’on