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LA GUEUSE PARFUMÉE.


puissance de l’induction à l’origine de votre dernière toilette, et deviner comment ce fouillis de dentelles, de nœuds, de rubans, de velours tressés et de soie découpée, s’est accroché morceau par morceau, dans le cours des siècles, autour d’une feuille d’arbre large comme la main, serait facile en comparaison de retrouver la signification première et vraie du mot amour, sous le nuage flottant de folies, de fantaisies et de rêves dont certains cerveaux creux qui font métier d’écrire l’ont insensiblement affublé.

Vénérez, madame, les modistes qui vous font charmantes ; mais laissez-moi détester les poëtes qui, sans que personne les en priât, ont ainsi perverti l’idée de l’amour parmi les hommes !

L’étoile scintille et la fleur sent bon. Ah ! si l’étoile embaumait, si la rose scintillait ! Et ils jurent, les brigands ! que cela s’est vu quelquefois. Nous les croyons, la rose et l’étoile se moquent de nous. Alors, désespérés de ne pas trouver dans l’amour les idéales délices que nous avions rêvées, nous passons sans voir celles que la nature y mit, et nous voilà pleurant et gémissant, pareils aux enfants trompés par des contes de nourrices, qui se trempent jusqu’aux os un jour d’orage, prennent le torticolis, et pleurent ensuite de ne pas voir Dieu le Père, en son bleu paradis, par la fissure éblouissante de l’éclair.

Et la cause de tout cela ? Les poëtes, parbleu ! les poëtes qui se moquent de nous, comme les capucins