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VIII

palestine et maygremine

Mars était venu, et, de la montagne à la plaine, la terre s’éveillait de son long sommeil. Ni fleurs ni feuilles encore, sauf quelques violettes dans l’herbe, et sur la lisière des bois l’ellébore dressant sa tige bizarre et sa fleur de la même couleur soufrée. Mais la sève gonflait les troncs, l’herbe humide se relevait au soleil nouveau, et, dans les bois, les sources et les ruisselets emportaient en hâte les feuilles tombées, comme pour faire disparaître les dernières traces de l’hiver. Quelques rares oiseaux se hasardaient à chanter, la brise semblait souffler plus douce ; et, comme on devine la femme aimée au seul parfum de ses cheveux, au seul bruit de son pas connu, on sentait le printemps venir, sans le voir encore.

Maître Cabridens s’était, depuis un mois, transporté à sa campagne de Palestine, ou plutôt de Maygremine, comme les paysans l’appelaient malgré le propriétaire, ne voulant pas donner à la maison neuve plantée ainsi qu’une auberge dans la poussière de la