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LA GUEUSE PARFUMÉE

Cette fois pourtant, il ne s’agissait point d’une pièce romaine, quoi qu’en pensât mon père, plus fort en agriculture qu’en numismatique, mais d’une pièce bien autrement curieuse, d’une pièce inconnue, inespérée, unique, d’une pièce dont le savant et vénérable historien de Canteperdrix, l’ami d’A. Thierry et de Ch. Nodier, M. de La Plane, n’avait pu soupçonner l’existence, d’une pièce, enfin, sur la face de laquelle je lus facilement, malgré la rouille et la terre séchée : CANTAPERDIX CIVITAS ! Sur le revers, au milieu de lettres presque effacées que je ne déchiffrai point, on distinguait, armes parlantes de la ville, une bartavelle qui chantait dans un champ de blé.

La découverte de cette médaille prit les proportions d’un événement. Ainsi, dans un temps où la France gémissait encore sous le poids de la féodalité, Canteperdrix se gouvernait librement et battait monnaie ! Chacun voulait voir la fameuse pièce ; quelques jaloux insinuèrent qu’elle pourrait bien être fausse, mais tous, enthousiastes ou sceptiques, me conseillèrent la même chose : — il faut porter cela à maître Cabridens.

Porter cela à maître Cabridens ! Quelle impression ces simples mots me faisaient !… Entrer dans la maison de mademoiselle Reine ! Qui sait ? la rencontrer… lui parler peut-être…

— Ah ! me disais-je en regardant cette pauvre petite pièce laide à voir, c’est avec une pièce semblable