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LA GUEUSE PARFUMÉE.

venues sauvages, de grands rosiers, les rosiers de la marquise, qui avaient continué de fleurir là.

Comme j’étais resté fort longtemps à considérer les pipes de mon cousin et ses pantoufles, le soir tombait quand nous arrivâmes, Scaramouche et moi, sur la terrasse de Palestine.

Scaramouche était un petit épagneul tout de noir vêtu, avec une paire de lunettes couleur de braise. Nos paysans de Canteperdrix n’aiment pas les chiens, animal, disent-ils, qui mange beaucoup et ne fait guère ; mais je passais pour fou, et mon père, au grand scandale du quartier, avait cru devoir, en cette occasion, me laisser satisfaire ma folie.

Je m’assis donc sur l’herbe pour réfléchir à mes projets d’amour. Scaramouche, lui, préféra se livrer aux plaisirs de la chasse, courant sus d’une égale ardeur aux troncs d’arbres et aux papillons de nuit. On ne voyait plus le soleil, mais tout un côté du ciel restait rouge. La lune, pâle encore au milieu des mourantes clartés du jour, devenait à chaque instant plus visible ; c’était l’heure du crépuscule, si charmante aux champs, quand les oiseaux attardés descendant par vols dans les branches et les rainettes commençant leur chanson, le silence se fait là-haut, tandis que plus bas, tout près de terre, la verdure et les bois pleins de chants étouffés et de bruits d’ailes préludent vaguement aux musiques de la nuit.

A quelques pas de moi, appuyée sur les balustres