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LE CANOT DES SIX CAPITAINES.


trace au pied des hauteurs cultivées du golfe, la plage avec son sable fin, les fermes, les maisonnettes, les villas, balcons de roseaux et toits en terrasse, s’étaient couverts de spectateurs enthousiasmés qui, sur l’îlot de la Fournigue inondé de soleil levant, regardaient remuer le phoque.

— On dirait qu’il a grandi…

— Il marche sur ses pattes de derrière.

— Il est blanc maintenant, l’année passée il était noir.

— C’est la vieillesse… Bon vieux phoque ! N’est-ce pas dégoûtant que les Américains s’amusent à le canonner ?

— Il ne reviendra plus si on le canonne.

Vainement un promeneur d’âge rassis, possesseur d’une lunette d’approche, notre capitaine Varangod, fit-il remarquer que ce phoque à ventre blanc, monté sur des pattes de derrière très-hautes, pourrait bien être un homme vêtu de coutil.

— Un homme sur la Fournigue ?… Et qu’est-ce qu’il y ferait, un homme sur la Fournigue… Et comment y serait-il allé, sur la Fournigue, puisqu’on ne voyait pas de bateau ?

Varangod se tut pour ne pas froisser la population.

La population tenait à son phoque !

Cependant, vers huit heures, l’escadre américaine cessait ses exercices de tir ; les riverains du golfe, ayant assez contemplé le phoque, étaient retournés