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LA GUEUSE PARFUMÉE.


équipage au complet, les six membres du Cercle nautique ramant et mademoiselle Cyprienne à la barre. Bourgeois et patrons de barque commençaient à rire dans Antibes ; comment faire ? Mais patience ! Lancelevée, toujours vert, toujours à son poste, venait le jour même d’être nommé président à vie dudit cercle, et, foi de colonel, non, de capitaine, maintenant les choses allaient marcher.

Car, vous l’avez deviné, ce n’est pas précisément par modestie qu’on a vu, au premier chapitre de cette histoire, Lancelevée repousser le titre de colonel, et préférer celui plus humble de capitaine. Pour un président de cercle nautique, officier de terre en retraite et qui veut jouer au loup de mer, colonel est une appellation gênante, quoique glorieuse. Colonel vous classe tout de suite son homme dans l’artillerie, le génie ou l’infanterie ; tandis que capitaine… ah ! capitaine !… Avec capitaine, il y a moyen de se faire illusion.

— Capitaine de quoi ?

— De frégate sans doute.

Aussi, depuis que M. de Vauban a rebâti les remparts d’Antibes et fait cette aimable petite ville, ville de garnison ; depuis qu’une colonie s’y est établie, colonie toujours renouvelée de vieux soldats, attirés là par la beauté du ciel et la chaleur du soleil ; depuis que ces vieux soldats devenus marins à force de regarder la mer, et essayant d’allier le déhanchement